Près de Toulouse, l’entreprise CLS retrace en temps réel via satellite, depuis les années 1980, les déplacements et «l’environnement physico-chimique» de plusieurs milliers d’animaux répartis dans les airs, sur terre et les océans. Stéphane Grébel, ingénieur programme développement chez CLS, a fait le déplacement au lycée Pierre-Paul Riquet pour nous donner quelques explications.
Oiseaux, requin-baleines, rennes … rien n’échappe aux huit satellites du programme Argos. C’est à Ramonville-Saint-Agne (31), à la périphérie de Toulouse, que l’on récolte les données envoyées par des traceurs installés sur 8.000 animaux. Supervisée par l’entreprise CLS, filiale du Centre national des études spatiales (Cnes), ses clients —qui sont surtout les scientifiques— étudient le comportement d’espèces animales dans leur habitat naturel.
Initié dans le début des années 1980, ce programme nommé Argos permet de comprendre les déplacements et l’influence du dérèglement climatique des espèces animales. Parmi elles, le requin-baleine. Avec l’association américaine Galapagos Whale Shark project, les scientifiques veulent déterminer si l’espèce est en danger et s’il faut la protéger à l’échelle internationale. Inoffensif pour l’Homme, le requin-baleine est considéré comme l’un des plus gros poissons du monde. Étudier cet animal n’est pas si simple, «il peut plonger jusqu’à deux milles mètres sous l’eau», explique Stéphane Grébel, ingénieur programme développement. À cette profondeur, il est impossible d’envoyer en temps réel les données de déplacement et «l’environnement physico-chimique» tel que la salinité de l’eau ou la température ambiante selon la périodicité souhaitée par les scientifiques. Alors, la balise installée sur la nageoire dorsale va se contenter d’enregistrer ces données «pendant 180 jours et se détacher automatiquement pour remonter à la surface». Pour d’autres espèces comme les oiseaux, l’ingénieur donne l’exemple du bec-en-ciseaux noir d’Amazonie : la balise reste sur l’animal pendant «pendant plusieurs années pour suivre les migrations». Son autonomie est garantie par «un panneau solaire» intégré à la balise qui «pèse au total 5 grammes». Pour d’autres animaux comme les rennes de Sibérie, en Russie, la balise peut tenir cinq années.
Sans danger pour l’animal, la balise peut se fixer avec «une colle spéciale» qui ne présente, selon l’ingénieur, aucun produit toxique qui n’abîme l’épiderme. Et si la balise se décroche, le satellite situé «à plus de 800 kilomètres» peut donner une localisation précise même dans les contrées les plus reculées sous la canopée tropicale d’Amazonie. «L’animal le plus atypique que nous avons pu suivre, c’est le crabe d’Alaska», confie Stéphane Grébel. Cette prouesse technologique a un prix, selon les modèles, «au moins 1.500€ et jusqu’à plusieurs milliers d’euros» l’unité pour une balise plus complexe. Au service de l’étude des animaux, le programme Argos devrait permettre, demain encore, d’en savoir plus sur le comportement des espèces animales mais aussi de confirmer que ces changements de comportements sont du, en partie, à l’activité humaine.
✍️ : Kevin Figuier